The blog of Istituto Svizzero allows Fellows and Senior Fellows to connect with the public during their stay in Rome, Milan or Palermo, offering a unique perspective on the progress of their practice and research. Through a series of regularly published articles, one has the opportunity to closely follow the research and reflections of the residents. To read blog posts from previous editions click here.
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Sybille Berg est nĂ©e en 1968 Ă Weimar (RDA). Elle a vĂ©cu dans une famille dâaccueil Ă Constanta, la ville portuaire roumaine sur la Mer Noire, puis en IsraĂ«l et en Allemagne. De nationalitĂ© suisse, Sybille Berg est lâautrice dâun grand nombre de nouvelles, essais, courts rĂ©cits de fiction, piĂšces de théùtre, piĂšces radiophoniques et rubriques.
Elle est une Ă©crivaine contemporaine, considĂ©rĂ©e comme lâun des auteurs et dramaturges les plus cĂ©lĂšbres et les plus influents du monde germanophone. Elle a remportĂ© de nombreux prix prestigieux tout au long de sa longue carriĂšre et ses 15 livres ont Ă©tĂ© traduits dans 30 langues.
Sybille Berg est devenue une figure emblĂ©matique dans les milieux de la sous-culture allemande, gagnant une trĂšs large base de fans auprĂšs de la communautĂ© LGBT et dans les communautĂ©s artistiques europĂ©ennes. Sibylle Berg a reçu le Prix Suisse de littĂ©rature pour son dernier roman GRM â Brainfuck. En 2020 elle a reçu le Grand Prix de LittĂ©rature, le prix le plus prestigieux dĂ©cernĂ© par la Suisse pour une oeuvre littĂ©raire.
Mon sĂ©jour Ă lâIstituto Svizzero Ă Rome est tombĂ© un peu comme quand on gagne Ă la loterie : pile au moment oĂč je me demandais dans quel coin dâEurope lâaction de mon nouveau livre allait se dĂ©rouler. En 2019 le premier livre de ma trilogie paraissait. La premiĂšre partie â GRM-Brainfuck â se passait en Angleterre, la deuxiĂšme â RCE Remote Code Execution â dans toute lâEurope, avec son centre au Tessin â et, dĂ©sormais, câĂ©tait une Ă©vidence, le nouveau tome NEW qui dĂ©crit la reconstruction post-dĂ©bĂącle du systĂšme financier et du systĂšme social, devait se passer en Italie. LâItalie, le pays que pratiquement le monde entier croit connaĂźtre, et qui pourtant recĂšle encore de bonnes et de mauvaises surprises : anarchie, fascistes, communistes, beautĂ© et dĂ©clin, convivialitĂ© et criminalitĂ©, richesse et pauvretĂ© absurde.
Le dĂ©cor parfait pour le lancement dâune expĂ©rimentation socialiste utopique.
Mes recherches en Italie ont dĂ©butĂ© lâannĂ©e derniĂšre, avec des voyages dans des lieux dĂ©serts dans le Nord du pays, des discussions avec des scientifiques et des sociologues italien.ne.s. A cet Ă©gard le sĂ©jour Ă lâIstituto Svizzero sâest rĂ©vĂ©lĂ© parfait pour approfondir les sujets avec deux guides locaux.
Jâai eu droit Ă un cours accĂ©lĂ©rĂ© sur, en vrac, les ghettos, la mafia, lâanarchie, les squatts, les rĂȘves dâavenir et le dĂ©sespoir Ă Rome, les banlieues, Naples, la Sicile. Et aujourdâhui, de retour Ă la maison, jâespĂšre Ă©crire un best-seller absurde et gĂ©nial. HĂ©lĂ s!
Je ne peux sortir quâun mauvais italien, je mâĂ©tais imaginĂ© que ça viendrait tout seul, dans la belle villa. Câest plutĂŽt ratĂ©.
Sybille Berg est nĂ©e en 1968 Ă Weimar (RDA). Elle a vĂ©cu dans une famille dâaccueil Ă Constanta, la ville portuaire roumaine sur la Mer Noire, puis en IsraĂ«l et en Allemagne. De nationalitĂ© suisse, Sybille Berg est lâautrice dâun grand nombre de nouvelles, essais, courts rĂ©cits de fiction, piĂšces de théùtre, piĂšces radiophoniques et rubriques.
Elle est une Ă©crivaine contemporaine, considĂ©rĂ©e comme lâun des auteurs et dramaturges les plus cĂ©lĂšbres et les plus influents du monde germanophone. Elle a remportĂ© de nombreux prix prestigieux tout au long de sa longue carriĂšre et ses 15 livres ont Ă©tĂ© traduits dans 30 langues.
Sybille Berg est devenue une figure emblĂ©matique dans les milieux de la sous-culture allemande, gagnant une trĂšs large base de fans auprĂšs de la communautĂ© LGBT et dans les communautĂ©s artistiques europĂ©ennes. Sibylle Berg a reçu le Prix Suisse de littĂ©rature pour son dernier roman GRM â Brainfuck. En 2020 elle a reçu le Grand Prix de LittĂ©rature, le prix le plus prestigieux dĂ©cernĂ© par la Suisse pour une oeuvre littĂ©raire.
On peut cueillir le jour, comme le dit Horace, mais peut-on cueillir hier et demain aussi ? La gestion des souvenirs heureux et des craintes est cruciale Ă lâexercice du bonheur Ă©picurien. Une erreur de comprĂ©hension pourrait sâavĂ©rer fatale Ă la bĂ©atitude. Ce serait dommage.
Le poĂšte et philosophe Ă©picurien (ou philosophe et poĂšte, câest selon) LucrĂšce prĂ©tend que si le temps nâest rien en soi (De rerum natura 1.459), le passĂ© est nĂ©anmoins une propriĂ©tĂ© dâun lieu ou dâun objet. Car le temps est corrĂ©latif de tout changement et tout changement dĂ©pend dâun objet. Chaque chose aurait ainsi son histoire en elle, Ă©voluant conjointement et se dĂ©gradant doucement.
La conceptualisation dâun temps abstrait Ă partir de cela est une affaire trĂšs dĂ©licate. Le « temps » ne dĂ©pend alors plus seulement de lâobjet changeant ou du phĂ©nomĂšne se produisant, mais aussi de son observation. Le rapport empirique au temps doit toujours rester au centre de sa conceptualisation. Une confiance aussi solide dans la validitĂ© de lâexpĂ©rience pour une chose aussi abstraite est remarquable dans lâantiquitĂ©. Mais cela crĂ©e Ă bien des Ă©gards plus de problĂšmes que cela nâen rĂ©sout : peut-on alors jamais vraiment parler dâautre chose que de nos ressentis ?
Epicure nous met devant un dilemme quâon retrouve sous dâautres formes chez les philosophes H. Bergson et J. McTaggart, quelques 2000 ans aprĂšs LucrĂšce. Temps-Ă©volution objectif ou temps-durĂ©e subjectif, causal ou perçu, changement ou concept, le chemin de crĂȘte entres les diffĂ©rents temps est malaisĂ©. Les phrases Ă moitiĂ© finies sur des papyrus carbonisĂ©s par lâĂ©ruption du VĂ©suve ou sur des parchemins abĂźmĂ©s du Vatican ne nous aident pas franchement Ă comprendre les Ă©picuriens. Ces sources Ă©parses, fragmentaires et souvent lacunaires forcent la spĂ©culation Ă chaque coin de lignes. Câest un risque et une opportunitĂ©. Câest la sĂšve de la passion philologique.

Vue plongeante sur lâhermĂšs bicĂ©phale en marbre reprĂ©sentant Epicure et son disciple MĂ©trodore, retrouvĂ© au Portico di Santa Maria Maggiore et exposĂ© dans la âSalle des Philosophesâ des MusĂ©es Capitolins de Rome (inv. MC 576 ; copie romaine dâun original grec ; 2e siĂšcle de notre Ăšre).
Ma recherche sur le temps Ă©picurien avance une nouvelle lecture des textes qui dynamise le dualisme entre temps absolu (celui de la course effrĂ©nĂ©e des atomes) et temps de lâexpĂ©rience (entre deux pauses-cafĂ©). En creux, câest la portĂ©e ontologique des concepts chez Epicure dont il est question. Car dire ce que lâon sait ne revient pas forcĂ©ment Ă dire ce qui est. Faire le premier est dĂ©jĂ complexe, tenter le second est audacieux. Mais je crois Epicure ambitieux.
Rome antique sans romantique
Jâai commencĂ© ma rĂ©sidence de 5 mois ici Ă Rome Ă la mi-fĂ©vrier. Personnellement plutĂŽt portĂ© sur la thĂ©orie et les textes, la ville mâa rapidement rappelĂ© Ă la rĂ©alitĂ©. LâexpĂ©rience sensorielle constante de productions antiques interroge : comment les voir (ou les ignorer) ? Les lire ou les Ă©crire ? On peut en tout cas difficilement en faire lâĂ©conomie, si tant est mĂȘme quâon le veuille. A Rome, ma rĂ©flexion sur le temps est devenue inĂ©vitablement plus empirique. Cela peut paraĂźtre paradoxal mais cette surcharge de passĂ© visible recalibre mon rapport Ă celui-ci vers plus de sobriĂ©tĂ©. Elle me permet de prendre du recul. A lâusage (ou Ă lâusure), « lâantiquité », ce prĂȘt-Ă -penser commode dont on se croit, se veut ou mĂȘme se crĂ©e si facilement hĂ©ritiers, se rĂ©vĂšle moins exemplaire, moins grave et plus commune. RelativisĂ©e. DĂ©dramatisĂ©e. Il devient alors plus aisĂ© de chercher et partager ses connaissances sans quâĂ son insu on en ait fait les proxys de ses propres valeurs. On perd peut-ĂȘtre en grandiloquence, mais on gagne largement en honnĂȘtetĂ© intellectuelle.
Ces rĂ©flexions sur la prĂ©sence et lâutilisation de lâantiquitĂ© mâont conduit Ă Â organiser une table ronde (ce 31 mai) avec lâartiste en rĂ©sidence Sophie Jung. Le thĂšme en est les canons littĂ©raires et esthĂ©tiques, domaine oĂč lâantiquitĂ© a longtemps jouĂ© un rĂŽle Ă©crasant tant sur la recherche que sur la crĂ©ativitĂ©. Mais mon questionnement du rapport Ă lâantiquitĂ© mâa aussi amenĂ© Ă travailler avec lâartiste en rĂ©sidence GrĂ©gory Sugnaux dans la rĂ©alisation dâune sculpture hybride combinant la typologie du pilier hermaĂŻque antique avec un objet de consommation actuel.

Dispenser, sculpture de G. Sugnaux et S.-J. Hirschi, plan dessiné par G. Azzariti.
Ces collaborations mobilisant des compĂ©tences variĂ©es font se tĂ©lĂ©scoper les temporalitĂ©s et les rĂ©fĂ©rences. Les savoirs deviennent une matiĂšre Ă travailler. Ils se dĂ©sacralisent, les formes se dĂ©forment, les possibles sâĂ©tendent.
Les clepsydres molles
Il nâest pas certain quâEpicure ait rĂ©ellement dĂ©fendu lâexistence dâun temps absolu, mĂȘme sâil semble parfois jouer avec lâidĂ©e. En arrivant, je partais du principe quâil allait falloir trancher, me dĂ©cider face au dualisme. Mais la relecture des manuscrits et le goĂ»t du mille-feuille archĂ©ologique romain (plutĂŽt que le camembert) remettent les idĂ©es en place. Le temps est plus mou quâon veut bien le croire. Tout comme lâantiquitĂ©, il est peut-ĂȘtre avant tout ce quâon en fait.
Les strates historiques de Rome affleurant ci et lĂ accompagnent quotidiennement ma rĂ©flexion sur le temps dâune part et sur les enjeux et dĂ©fis de ma discipline dâautre part. Se confronter aussi intensĂ©ment aux fragments et reliefs du passĂ© courbe la pensĂ©e. On revient sur ses Ă©vidences, on les actualise, on prend mieux conscience de son interprĂ©tation.

Sauver le temps et le camembert de DalĂ, image gĂ©nĂ©rĂ©e Ă lâaide de DALL-E.
Solmeng-Jonas Hirschi (1992) travaille depuis 2021 comme assistant de recherche post-doctoral Ă lâUniversitĂ© de Fribourg, oĂč il enseigne le grec ancien ; actuellement il se consacre Ă lâĂ©laboration du catalogue numĂ©rique des papyrus conservĂ©s au MusĂ©e BIBLE+ORIENT. Il est diplĂŽmĂ© en grec ancien, latin, histoire et anthropologie de lâUniversitĂ© de Berne (2015). Par la suite, il a obtenu un Master en linguistique et papyrologie Ă la University of Oxford (2016), oĂč il a terminĂ© son doctorat (2021) sur la pragmatique de la thĂ©rapie philosophique dans les lettres dâĂpicure, sous la direction du professeur Tobias Reinhardt. Ă Rome, il poursuivra son projet de recherche De Temps en Temps â Epicure, Bergson, McTaggart, qui explorera le concept de temps dans lâĆuvre de ces trois philosophes.